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Le 9 juin 2018

L’Administration fiscale commente l’IFI…

Une semaine avant la date limite de dépôt de la déclaration IFI, l’Administration vient d’intégrer ses commentaires au Bofip !

Bien que volumineux (environ 300 pages), à première lecture, cette instruction ne semble pas apporter d’informations déterminantes par rapport au texte légal et aux commentaires déjà publiés, soit parce qu’ils les confirment, soit parce que les points les plus délicats ne sont pas traités. Cependant, certaines confirmations ou prises de position de l’Administration mérite d’être soulignées ou à tout le moins, connues.

Nous avons essayé ici de relever les points qui nous semblent les plus importants en vue d’établir la déclaration IFI à déposer d’ici le 15 juin prochain.

Il ne s’agit que d’une première analyse, nécessairement incomplète qui méritera d’être approfondie lorsque nous aurons pris le temps d’analyser l’intégralité des commentaires administratifs.

Personnes imposables

Pas de nouveauté, il s’agit des personnes physiques, l’Administration fiscale précise concernant la qualité de non résident que celle-ci se constate au 1er janvier de l’année d’imposition et non sur l’année entière.

De même, elle semble admettre que les conventions fiscales prévoyant des dispositions propres à l’impôt sur la fortune s’appliquent en matière d’IFI.

Assiette taxable

Immeubles

Quelques précisions ou rappels sur la nature juridique des biens immobiliers y compris les immeubles par destination.

L’administration indique par exemple que :

  • les immeubles construits sans permis de construire ne sont pas pour autant hors de l’assiette taxable de l’IFI (mais pour quelle valeur vénale ?),
  • les concessions dans les cimetières ne sont qu’un droit d’usage, par suite exclues de l’assiette de l’IFI, fallait-il y penser…
  • une prudence particulière est préconisée pour l’évaluation des monuments historiques en raison des charges importantes qui les grèvent.
  • concernant l’usufruit, il est rappelé que seul l’usufruitier est taxable sur la valeur en pleine propriété (sauf cas particulier) et qu’il en est de même en cas de cession temporaire d’usufruit, tout en précisant qu’elle sera vigilante au regard des abus de droit éventuels.
    Par ailleurs, elle confirme qu’en cas d’usufruit détenu par une personne morale, c’est la valeur de l’usufruit (et donc pas de la pleine propriété) qui doit être pris en compte pour la détermination de la fraction taxable de la société.

Parts ou actions de sociétés

Une précision portant sur les organismes n’ayant pas la personnalité morale « propriétaire » de biens immobiliers : selon l’Administration, il convient de considérer l’associé comme directement propriétaire d’une quote part de l’immeuble sous-jacent, les règles propres à la valorisation d’actions ou parts sociales ne sont donc pas applicables.

Concernant la méthode de détermination de la fraction taxable des parts ou actions de sociétés (car représentatives de la valeur des biens immobiliers sous-jacents), l’Administration confirme tout d’abord le principe de calcul de la fraction taxable de la valeur de ces parts ou actions :

Lorsque des biens ou droits immobiliers imposables sont inscrits à l’actif de la société ou de l’organisme dont le redevable, ou l’un des membres du foyer fiscal, détient directement des parts ou actions, il convient de déterminer :
– la valeur totale des parts ou actions de la société ou de l’organisme que le redevable et les autres membres du foyer détiennent directement (A) ;
   Remarque : Cette valeur s’entend notamment après réintégration, le cas échéant, de la valeur des dettes non déductibles au sens du II de l’article 973 du CGI (BOI-PAT-IFI-20-30-30).
– la valeur vénale réelle de chacun des biens et droits immobiliers imposables détenus par cette société ou organisme (B) ;
– la valeur vénale réelle de l’ensemble des éléments composant l’actif de cette société ou organisme, y compris la valeur vénale réelle des biens et droits immobiliers imposables (C).

Ces valeurs sont déterminées conformément aux principes en matière d’évaluation définis au BOI-PAT-IFI-20-30, suivant la nature des actifs à évaluer.

La fraction imposable de la valeur des parts ou actions détenues par le redevable correspond à la valeur de ces parts ou actions (A) auquel est appliqué le coefficient correspondant au rapport entre, d’une part, la valeur vénale réelle des biens ou droits immobiliers imposables (B) et, d’autre part, la valeur vénale réelle de l’ensemble des actifs de la société ou de l’organisme dans lequel le redevable détient une participation directe (C).

Le redevable doit inclure dans l’assiette de l’IFI la fraction imposable ainsi déterminée. (bofip-PAT-IFI-20-20-20-10-180608 n°90)

♦ Aucun retraitement n’est préconisé quel que soit le type d’actif pouvant figurer au bilan, seuls doivent être identifiés et valorisés pour le calcul de la fraction taxable, les biens et droits immobiliers et le montant total de l’actif ; une fois la fraction taxable déterminée sous la forme d’un coefficient, celui-ci est appliqué à la valeur vénale des parts ou actions concernées.

Ensuite, en cas de détention de biens immobiliers au travers de plusieurs sociétés en cascade, L’Administration confirme la compréhension du texte légal par la doctrine, à savoir :

En pratique, il convient d’identifier la société ou l’organisme détenant des biens ou droits immobiliers imposables dont le niveau dans la chaîne de participation est le plus bas. 

Il est alors fait application à cette société ou à cet organisme des modalités de calcul prévues au I-C-1 § 90 afin de déterminer le coefficient correspondant à la fraction de la valeur de ses titres représentative de biens et droits immobiliers imposables. 
Le coefficient ainsi déterminé est appliqué à la valeur de ceux de ses titres qui sont détenus par la société ou l’organisme de niveau supérieur dans la chaîne de participation. Le résultat est alors ajouté à la valeur des biens et droits immobiliers imposables détenus directement par cette société ou cet organisme pour le calcul, suivant les modalités précitées, du montant de la valeur imposable des parts ou actions de cette société ou de cet organisme intervenant dans la chaîne de participation. 

Cette procédure est ensuite reproduite à chaque niveau d’interposition, jusqu’à la société ou l’organisme dont le redevable détient directement des parts ou actions. (Bofip précité, n° 120)

Exonérations

Société exerçant une activité opérationnelle et exonération

Pour mémoire, les actifs affectés à l’activité opérationnelle de la société qui en est propriétaire ou d’une société du même groupe (la notion de groupe pouvant être restrictive) sont exclus de l’assiette taxable.

De même, les parts ou actions de sociétés ayant une activité opérationnelle ne sont pas incluses dans la base taxable du redevable si celui-ci détient moins de 10% des dits titres (directement ou indirectement).

Sur ce sujet, l’Administration :

  • Précise le cas des sociétés ayant une activité mixte (opérationnelle et civile) pour tout d’abord considérer que le texte légal ne permet l’exclusion que pour les sociétés ayant une activité exclusivement opérationnelle (ce que la loi ne précise pas…) pour ensuite faire preuve de « pragmatisme » en acceptant de prendre également en compte pour l’exclusion, les sociétés ayant principalement une activité opérationnelle, à savoir celles dont la valeur réelle des actifs affectés à l’activité et le montant du CA que génère la dite activité représente au moins 80% de leur total respectif.
    ♦ Ce seuil de 80% pourrait probablement être discuté, il a au moins le mérite d’exister et de sécuriser les cas où il est atteint.

  • La notion d’affectation n’est pas commentée par l’Administration, il nous semble donc qu’il convient d’en avoir une appréciation large et d’y inclure tous les biens immobiliers utilisés pour l’activité opérationnelle indépendamment des modalités juridiques (propriété, bail, mise à disposition, …) ou leur comptabilisation (immobilisation ou stock), sous réserve que l’utilisation pour l’activité opérationnelle ne soit pas contestable.

  • Le Bofip confirme expressément que les activités dont l’objet est l’immobilier (hors location), à savoir la promotion et les marchands de biens, sont éligibles à la notion d’activité opérationnelle car mentionnées par les articles 34 et 35 du CGI. Rien n’est dit sur les biens affectés à ces activités sauf indirectement dans les commentaires relatifs à l’exonération des biens affectés à une activité professionnelle au sens de l’ancien ISF : l’administration précise alors que les biens pouvant être exonérés peuvent être détenus via des sociétés et notamment des parts de SCCV détenues par des entreprises de construction de logements (Bofip-PAT-IFI-30-10-10-40-20180608, n° 50), ce qui suppose que les immeubles sous-jacents exonérés sont inscrits en stock.

  • Enfin, il est précisé que : Toutefois, présentent un caractère professionnel les immeubles de rapport lorsque leur acquisition résulte d’une obligation légale ou réglementaire pour la société (Il en est ainsi, à titre d’exemple, des immeubles affectés à la représentation des provisions techniques des compagnies d’assurance, conformément aux dispositions de l’article R. 332-2 du code des assurances et de l’article R. 332-3 du code des assurances), (Bofip-PAT-IFI-30-10-40-20180608, n° 190).
    ♦ On pourrait s’interroger sur l’analogie avec des promoteurs à qui leurs clients imposent d’être Co-investisseurs dans des programmes locatifs sur une certaine période ?

OPC

Certains OPC peuvent bénéficier d’une exonération si le redevable en détient moins de 10% et que l’OPC détient moins de 20% d’actifs taxables.

L’Administration précise : Notamment, ne sont pas retenus les immeubles et droits immobiliers détenus dans des sociétés ou organismes qui ont pour activité une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale dont le redevable détient moins de 10 % dans les conditions mentionnées supra au I § 1 à 100. (Bofip-PAT-IFI-20-20-20-20-20180608, n° 160)

L’appréciation de l’actif taxable de l’OPC ne doit pas se faire en ne tenant compte que des exclusions objectives pouvant être constatées au niveau de l’OPC (affectation à une activité opérationnelle par exemple) mais également en tenant compte de la situation du porteur et notamment de sa participation indirecte via l’OPC dans les sociétés sous-jacentes.

De ce fait, tous les porteurs ayant moins de 10% dans l’OPC pourront bénéficier de la non prise en compte des actifs éventuellement taxables mais détenus par des sociétés opérationnelles pour le calcul du seuil de 20% d’actifs taxables au niveau de l’OPC, le mécanisme est complexe mais favorable.

♦ Cela ne fonctionne pas en cas de co-investissement du porteur dans les sociétés opérationnelles en cause, qui aurait pour effet de faire passer sa détention indirecte (via l’OPC et hors l’OPC) au-delà de 10% !

Dettes des sociétés propriétaires d’actifs immobiliers

Un certain nombre de restrictions sont prévues en matière de déduction des dettes pour l’évaluation des sociétés propriétaires de biens immobiliers, notamment les dettes envers les redevables, leur famille ou les sociétés qu’ils contrôlent (ce qui de fait peut concerner toutes les dettes intragroupes). Ces restrictions à la déduction de certains passifs ne s’appliquent pas si le redevable peut démontrer qu’elles ne sont pas motivées par la recherche d’un objectif principalement fiscal.

Sur ce point, l’Administration confirme (et c’est heureux) que :

Tout d’abord :

  • Cette règle ne vaut que pour le redevable également préteur direct ou indirect et non pour les autres actionnaires de la société en cause, ce qui semblait l’évidence mais restait incertain à la lecture du texte légal.

Ensuite :

  • La notion d’objectif principalement fiscal est plus large que la notion de but exclusivement fiscal au sens de l’article L. 64 du livre des procédures fiscales (LPF), relatif à l’abus de droit fiscal (BOI-CF-IOR-30). Elle s’apprécie au regard de la charge d’IFI à laquelle est assujettie le redevable. Ainsi, peuvent être susceptibles de caractériser un objectif principalement autre que fiscal les circonstances que la dette a été souscrite avant la création de l’IFI au 1er janvier 2018, ou à une date très antérieure à celle à compter de laquelle le foyer fiscal est devenu redevable de cet impôt. (Bofip-PAT-IFI-20-30-30-20180608, n° 240) 

    ♦Sauf cas particulier, le passif mis en place avant 2018 devrait donc être déductible sans restriction (mise à part celui ayant pour objet de financer l’acquisition d’un bien immobilier auprès du contribuable directement ou indirectement).

Enfin:

  • Concernant les prêts consentis par le groupe familial à la société détenu par le redevable pour l’acquisition d’un bien imposable, le principe de non déductibilité ne s’applique pas si le redevable démontre que le prêt a été souscrit à des conditions normales (article 973 II 3° du CGI). Sur ce point le texte légal mentionne notamment l’effectivité des remboursements. L’Administration précise : Le caractère normal des conditions du prêt s’apprécie notamment au regard des pratiques bancaires usuelles dans le domaine concerné. (Bofip précité, n° 270). 

    ♦ En cas de doute, il pourra être opportun de bénéficier d’offres bancaires similaire au prêt familial mis en place pour démontrer le caractère normal du prêt. On rappellera que dans d’autres domaines faisant appel à cette notion (sous-capitalisation), les contentieux sont nombreux !

La pratique mettra certainement en exergue bien d’autres interrogations et difficultés sur lesquelles nous essaierons de revenir régulièrement… et bon courage pour cette première déclaration IFI !

 

De Pierre Appremont