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Actualité

Le 26 septembre 2018

 

L’investissement immobilier concerné par le PLF 2019…

 

Le Projet de Loi de Finances (PLF) pour 2019 prévoit de nouvelles règles limitant la déduction fiscale des charges financières !

 

L’immobilier ayant largement recours à l’effet de levier financier, la question de la déduction fiscale des frais financiers a un impact significatif sur le rendement de l’investissement.

 

Or, la déduction des charges financières du résultat fiscal d’une société est encadrée par différents dispositifs : taux d’intérêt limite (référence au taux de marché et limite spécifique pour les prêts d’associés), imposition minimale du créancier (notamment s’il est établi hors de France) et règles dites de sous-capitalisation (prêts consentis par des entreprises liées au débiteur).

 

Alors que les règles relatives au taux et à l’imposition minimale du créancier resteraient inchangées, les règles dites de sous-capitalisation seraient profondément modifiées par le PLF pour 2019, diffusé le 24 septembre 2018.

 

Ce projet est dans la ligne de la Directive ATAD de l’UE en date du 12 juillet 2016.

 

Ainsi, les règles actuelles (3 ratios, franchise de 150 K€, application aux charges groupes et assimilées …) seraient supprimées pour laisser place à de nouvelles règles dont les caractéristiques sont exposées ci-après (application prévue aux exercices ouverts à compter du 1er janvier 2019).

 

Dans la mesure où il est probable que ce texte devienne définitif dans une forme assez proche du projet, il peut être avisé d’utiliser les 3 mois qui viennent pour analyser les conséquences de ce changement sur les financements en place et le cas échéant les modifier.

 

A noter que ces modifications n’affecteraient pas les SPPICAV en raison de leur statut de véhicule éxonéré d’IS.

 

Synthèse des nouvelles règles limitant la déductibilité des charges financières

 

(*) Est sous-capitalisée, une société dont la dette globale auprès de sociétés liées est au moins 1,5 fois supérieure à ses fonds propres.
(**) EBITDA fiscal : résultat fiscal majoré des charges financières nettes, des amortissements et provisions nets des reprises et plus-values imposables nettes des moins-values relevant du taux de 19 %.
(***) Calcul à adapter pour les groupes fiscaux (cf infra).

 

De nouveaux ratios

 

Les charges financières nettes (quel que soit le préteur) seraient déductibles dans la limite du plus élevé des 2 montants suivants :

 

  • 3 millions d’Euros (Mio €)
  • 30 % d’un « EBITDA fiscal », résultat fiscal dans lequel sont réintégrés :
    • – les charges financières nettes
    • – les amortissements et provisions nets des reprises, et
    • – les plus-values imposables au taux de 19 %, nettes des moins-values de même nature).

 

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Si charges finanières nettes < 3 Mio € → pas de limite à la déduction fiscale
Si charges finanières nettes ≥ 3 Mio € → plafonnement de la déduction fiscale

 

Ces limites sont réduites à 1 M€ et 10 % de l’EBITDA si la société est sous-capitalisée, c’est-à-dire lorsque le montant moyen des dettes groupe excède 1,5 fois celui des fonds propres :

 

  • Bonne nouvelle : ne seraient pas inclus dans les prêts intra-groupes, les prêts consentis par des tiers au groupe mais seulement garantis par une société du groupe (alors que c’est assez largement le cas aujourd’hui) !
  • Pour les groupes intégrés fiscalement, ces ratios sont appréciés au niveau des charges et du résultat fiscal du groupe (et non de chaque société membre).

 

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En cas de prêts intra-groupes > 1,5 fonds propres de la société emprunteuse :

  • Si les charges financières (y compris celles ne concernant les dettes du groupe) < 1 Mio € → pas de limite à la déduction fiscale
  • Si les charges financières ≥ 1 Mio € → plafonnement de la déduction fiscale

 

COMMENTAIRES

 ♦ Le nouveau régime pourrait donc entraîner la non-déduction partielle d’intérêts dus à des tiers en raison d’une situation de sous-capitalisation.
♦ Le champ d’application des règles de restriction de la déduction fiscale des frais financiers et leur portée seraient plus importantes qu’actuellement.
♦ Les seuils de mise en jeu des nouvelles règles seraient plutôt plus favorables (3 M€ / 1 M€ ; plus d’effet de seuil)
♦ L’EBITDA fiscal inclurait les plus ou moins-values de cession d’actifs immobiliers, ce qui pourrait permettre d’imputer une partie des charges financières non déductibles sur la période de détention, lors de la revente.

 

La prise en compte de l’ensemble des charges financières et de charges assimilées

 

Sont soumises aux limites exposées ci-avant, l’ensemble des charges financières suivantes, y compris lorsqu’elles sont capitalisées dans le coût d’origine d’actifs :

 

  • Intérêts intra-groupes
  • Intérêts d’emprunts bancaires
  • Intérêts de prêts participatifs et d’emprunts obligataires
  • Intérêts au titre d’instruments dérivés et de contrats de couverture
  • Gains et pertes de changes relatifs aux emprunts
  • Intérêts (reconstitués) correspondant aux biens pris en crédit-bail
  • Frais de garantie relatifs à des financements, frais de dossier
  • « Montants déboursés au titre de financements alternatifs »
  • « Montants mesurés par référence à un rendement financier déterminés par comparaison avec des entreprises similaires exploitées normalement au sens de l’article 57 »
  • « Tous les autres coûts ou produits équivalents à des intérêts »

 

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Les 3 derniers éléments devraient donc donner lieu à discussion pour la détermination des charges à prendre en compte !

 Ces charges seraient retenues pour leur montant déductible (selon les limites de taux et d’imposition minimale du créancier) réduit du montant des produits financiers de même nature.

 

Une mesure de faveur pour les groupes consolidés (clause de sauvegarde)

 

  • Sociétés ou groupe fiscal membre d’un groupe consolidé : possibilité de déduire 75 % des charges financières nettes non déductibles (selon les ratios précités) lorsque le ratio entre ses fonds propres et l’ensemble de ses actifs est supérieur (ou égal) à ce même ratio déterminé au niveau du groupe consolidé.

 

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Cette mesure de faveur ne s’applique pas si la société ou le groupe est sous-capitalisé !

 

 Report des charges non déductibles au titre d’un exercice

 

  • Possibilité de les déduire lors d’un exercice postérieur à hauteur de la différence entre la limite de déduction des charges financières nettes selon les ratios précités et les charges financières nettes de l’exercice (pas de limite de la faculté de report dans le temps).

 

Report de la capacité de déduction inemployée

 

  • Capacité de déduction inemployée : il s’agit de la différence entre la limite de déduction des charges financières nettes selon les ratios et les charges financières nettes déductibles de l’exercice.
  • Possibilité d’utiliser cette capacité de déduction inemployée au titre des 5 exercices suivants.

 

De Pierre Appremont & Samuel Drouin